La fresque de Louis Bouquet
La fresque qui décore le salon Afrique, situé à l’angle sud-ouest du hall d’honneur, et classé au titre des monuments historiques depuis 1987, a été réalisée par le peintre lyonnais Louis Bouquet (1885-1952). Elle a pour motif les apports culturels et intellectuels de l'Afrique.
Sur le panneau de droite, consacré à l’Afrique noire, sont représentées la musique et la danse, figurées par Apollon tenant sa lyre sous l’inspiration d’une majestueuse muse noire, les deux entourés par des danseuses. Le décor est fait à la fois de végétations luxuriantes, habitées de bêtes sauvages (un lion, un léopard chassant une antilope) et d’une architecture représentant la mosquée de Djenné, plus grand édifice en terre crue du monde, située au Mali et qui date de 1906. Fait notable, la mosquée de Djenné était aussi reproduite en miniature en tant que pavillon représentant le Mali dans l’Exposition coloniale.
Face à la porte d’entrée, trois panneaux illustrent les sciences et les arts arabes, chacun étant représenté par un personnage allégorique : sur le panneau à droite, l’astronomie (homme tenant un globe céleste, le regard tourné vers le ciel), les mathématiques (homme comptant sur ses doigts), la géométrie (homme avec un compas), l’agronomie (homme portant une houe), la botanique (femme cueillant des plantes), la médecine et la pharmacopée (homme avec un mortier et un pilon), la philosophie (avec deux personnages en plein débat), la poésie (femme tenant une lyre), l’éloquence (avec un homme déclamant le bras tendu) ; sur le panneau central, sont figurés la musique et le chant ; sur le panneau de gauche, viennent l’écriture et l’architecture.
Enfin, à gauche de l’entrée, la religion est incarnée par Mahomet (Mohammed en arabe), à qui l'ange Gabriel (Jibril en arabe) souffle à l'oreille la Révélation du Coran, accompagné de la figure de Saint-Michel qui terrasse le dragon, symbole du Mal. L'ange Gabriel et Saint-Michel sont des figures vénérées à la fois par le christianisme et l'islam, très présentes dans leurs iconographies respectives : le peintre a ainsi voulu mettre en avant les points de convergence entre les cultures orientale et occidentale à travers la musique, les sciences et la religion.
Les panneaux sont surmontés de nombreux modèles architecturaux (mosquées, cités, palais…) qui illustrent la richesse des cultures urbaines des civilisations arabo-musulmanes.
En ce qui concerne le traitement des personnages, dignes et imposants, ce qui frappe est leur position figée, frontale et hiératique. Leur sobriété fait écho à une certaine neutralité des expressions et à l’aspect sculptural des corps.
La touche du peintre est dessinée et linéaire, la peinture étant appliquée par aplats sobres (sans trace de pinceau) et par des lignes hachurées placées à la verticale, ce qui accentue l’impression de verticalité des parois du grand cylindre ovale de ce salon.
De même, les hachures renforcent la géométrisation des objets et des corps représentés. Les formes sont allongées et les figures élégantes et longilignes, ce qui accentue aussi la verticalité de l’architecture. L’ensemble de la fresque est traité à travers une trame géométrique où l’arabesque stylisée est très présente.
La gamme chromatique utilisée est limitée à celle des terres, associées ton sur ton, créant une palette générale sourde, accentuant l’aspect sculptural des silhouettes. Quelques touches de couleurs vives mettent en valeur étoffes ou objets.
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Louis Bouquet, le peintre, le poète et le héros, Philippe Dufieux, Lienart éditeur, 2010
Auteur de la fresque qui décore le salon Afrique du Palais de la Porte Dorée, ce peintre lyonnais, élève de Maurice Denis, s’est imposé parmi les brillants décorateurs de l’entre-deux-guerres et a participé aux prestigieux chantiers de son époque. Cet ouvrage apporte un éclairage complet sur l’œuvre de cet artiste à redécouvrir.