Albert Duchêne, commissaire de la section rétrospective
Le musée permanent des Colonies est divisé en deux sections muséographiques, la section rétrospective et la section de synthèse. Par décret du 22 mars 1927, la section rétrospective est confiée à Albert Duchêne (1866-1948), administrateur colonial.
Albert Duchêne a réalisé toute sa carrière au sein du ministère des Colonies, où il rentre comme commis en 1886. Il devient chef du bureau Afrique en 1899, puis sous-directeur de à la direction des Affaires politiques et administratives en 1908, et enfin directeur en 1920. En tant que chef du bureau Afrique, Duchêne participe à de nombreuses délégations sur des sujets industriels et commerciaux, telles que la Conférence télégraphique internationale de Londres en 1903 et la Conférence internationale de Bruxelles sur le régime des spiritueux en Afrique en 1906. À la direction des Affaires politiques, il effectue des missions diplomatiques sur la délimitation des frontières en Afrique de l’Ouest. Après la Première Guerre mondiale, il siège également à la conférence de la Paix de 1919 et à la conférence de Washington sur le désarmement naval en 1921-1922. Albert Duchêne est, aussi, professeur à l’École coloniale dès 1903 et fait partie des membres fondateurs de l’Académie des sciences d’outre-mer en 1922. Il publie en 1928 un ouvrage de synthèse, La Politique coloniale de la France : le ministère des colonies depuis Richelieu.

Legende
Galerie Est vers 1935. FRANOM_4FI_526_01_001.
Credit
© Archives nationales d'outre-mer
À sa nomination comme commissaire de la section rétrospective de l’Exposition coloniale, la première tâche de Duchêne est d’en définir le rôle. Le 16 janvier 1928, un règlement particulier indique qu’elle devra « évoquer l’œuvre d’expansion coloniale dans les pays d’outremer ayant relevé dans le passé, ou relevant encore de l’influence française » par des « objet d’arts, souvenirs de famille, livres, plans, dessins, cartes », mais aussi par des « dioramas, panoramas et cinémas ».
Les dioramas
À l’occasion de la première réunion de la commission consultative, le 5 juin 1928, Albert Duchêne insiste plus particulièrement sur l’importance des dioramas et du cinéma pour que la section rétrospective attire les foules : « Puisque celle-ci tend à reconstituer le passé colonial de la France, encore convient-il de le ressusciter autrement que dans des épaves illustres, dans des documents ou des tableaux respectables, mais vétustes : il faut le faire revivre sous une forme saisissante et avec tout l’attrait d’un spectacle ».
Cet objectif phare n’a été que partiellement rempli, puisqu’à cause d’un remaniement des espaces avec la section de synthèse, Duchêne n’a pu faire fabriquer que huit dioramas sur les seize initialement prévus.

Legende
Projet d’ensemble avec diorama, vitrines, luminaires et carte géographique, dessin au crayon
Credit
© Archives Nationales (fonds Laprade, 403 AP 231/2 pièce 47)
Un collaboration à travers toute la France
Il souligne aussi le rôle essentiel des correspondants locaux : « Loin de Paris, on ne lit guère le Journal officiel ; on ignore le règlement particulier du 16 janvier ; à peine soupçonne-t-on même qu’une Exposition coloniale internationale s’organise à Paris pour 1931 », alors même que « dans les musées de province, musées officiels ou musées privés, il existe bien des objets, ignorés ou inaperçus plus ou moins, qui trouveront leur place et prendront tout leur intérêt dans notre exposition rétrospective ».
Cet objectif a été atteint, dans la mesure où les nombreux voyages entrepris dans des villes de province par Duchêne et ses adjoints ont permis la création d’un vaste réseau de correspondants régionaux. Plusieurs objets issus de collections de musées territoriaux ont ainsi pu être prêtés pour l’exposition, comme le tableau Le siège de Rhodes par les Turcs (1480) du musée d’Epernay ou des vêtements offerts à l’impératrice Eugénie lors de son voyage en Algérie en 1860 du musée de Périgueux.

Legende
Le siège de Rhodes par les Turcs en 1480, huile sur bois transférée sur toile, fin XVe siècle, musée du Vin de Champagne et d'Archéologie régionale d’Epernay.
Credit
© Franck Boucourt.
La liste des « grands coloniaux »
Albert Duchêne est, enfin, associé à la réalisation de la liste des noms des « grands coloniaux », destinés à être gravés sur la façade ouest du musée permanent des Colonies. Il constitue ainsi une commission de quatre spécialistes sur ce sujet en octobre 1930 et suggère que « pour chaque nom, la période de vie et les titres de gloire, ceux-ci naturellement très brefs ». Il refuse, toutefois, d’assumer la responsabilité de cette liste lorsque Laprade lui demande de procéder à des corrections en juillet 1931.
Et après l'Exposition ?
Après l’Exposition coloniale, le commissaire de la section rétrospective Albert Duchêne occupe les fonctions de président de la Banque de l’Afrique occidentale. Il publie encore deux ouvrages sur des thématiques coloniales et maritimes, Un ministre trop oublié : Chasseloup- Laubat en 1932 et Les Rêveries de Bernardin de Saint-Pierre en 1935.